26 août 2007

Afrinizir IV

Quand la savane au crépuscule bleuit et que le chant des cigales s'estompe, le macaque sent le silence l'envelopper. C'est une pellicule très fine qui le recouvre et le pénètre. Il n'a pas toujours la force de s'ajuster au vide spontané que ce silence opère en lui. Scalpel impalpable le travaillant du dedans comme un souffle vertical, mais fibreux : la sensation dans les muscles ressemble à un décollage raté. Quelque chose lève et puis, d'un coup, retombe, et pique du nez, alors même que se découvrait l'horizon. Ce silence, c'est donc une détonation.

Un coup de feu, même attendu, surprend toujours par le vide qu'il crée autour de lui. Sur le coup, le coeur saute et tombe en parachute.

Le macaque appréhende le silence comme un chasseur sa proie: il l'attend tout en le craignant. Il sait que le silence recherché provoque un dérèglement des sens complexe et raffiné, une chute calibrée dans l'étrange. Il lui faudra du souffle, de la gomme et surtout de la térébentine pour tenir jusqu'au bout. Il songe à sa branche et fouille derrière ses paupières quelques images fugaces de l'aube quand elle chante. Soudain, le silence tendu comme une corde de guitare cède : Afrinizir! gémit le macaque! Ma terre! Kourma crac ouma chtouf! Au loin, le rugissement de la lionne ne se fait point attendre: "Maudit sois-tu engeance de macaque des neiges! Je te vois lévitant dans ta neige. Reviens parmi nous! La terre a soif!"

C'est ainsi que le macaque, sortant de sa torpeur, vint à nouveau se perdre dans la mêlée. Seul, mais entouré.

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Well written article.